Introduction
Malgré son abondance dans notre corps, le collagène est devenu un des suppléments le plus vendu, avec pour promesse une amélioration notable des cheveux, de la peau et des ongles, composants clés de la fontaine de jouvence.
Selon Google Trends, les recherches en ligne de collagène n'ont cessé d'augmenter régulièrement depuis 2014.
Mais au fait c'est quoi exactement le collagène ?
Le collagène représente une famille de protéines présentes dans tous le corps qui fournit la plupart des composants structurels de nos tissus conjonctifs :
- Ligaments
- Tendons
- Cartilage
- Peau
La famille des protéines du collagène comprend près de 33 % de toutes les protéines du corps humain. Il existe plusieurs types de collagène différents (16 pour être exact), mais près de 90 % de tout le collagène du corps humain provient des types I-III.
Le collagène est formé dans le corps humain en « assemblant » des fibrilles de collagène à partir de trois acides aminés : la proline, la glycine et l'hydroxyproline.
Ces fibrilles sont ensuite regroupées en groupes plus importants, un peu comme le tissu musculaire, pour fabriquer des fibres de collagène.
En tant que tel, le collagène a une structure semblable à un câble, en ce sens qu'il est composé de nombreux petits faisceaux de protéines regroupés, ce qui lui confère une grande partie de ses propriétés physiques, y compris une grande résistance à la traction.
Dans les aliments, le collagène se trouve naturellement uniquement dans la chair animale comme la viande et le poisson qui contiennent du tissu conjonctif. Cependant, beaucoup d'aliments d'origine animale et végétale contiennent les matériaux nécessaires à la synthèse de collagène dans notre propre corps.
Au fur et à mesure que l'on vieillit, nous en produisons de moins en moins, et cette chute est accélérée par d'autres facteurs tel qu'une exposition excessive au soleil, le tabagisme, la consommation d'alcool ou le manque de sommeil et d'exercice physique.
Avec l'âge, le collagène dans les couches profondes de la peau change, passant d'un réseau de fibres étroitement organisé à un labyrinthe inorganisé.
Les expositions environnementales peuvent également endommager les fibres de collagène en réduisant leur épaisseur et leur résistance, ce qui entraîne des rides à la surface de la peau.
Quid de la supplémentation en collagène ?
Apparu pour la première fois en tant qu'ingrédient dans les crèmes et les sérums pour la peau, son efficacité en application topique a rapidement été mise en doute par les dermatologues.
Le collagène ne se trouvant pas en surface mais dans les couches profondes de la peau, et les fibres étant trop grandes pour en imprégner les couches externes, la recherche n'a pu établir que des chaînes de collagène courtes (les peptides de collagène) puissent avoir une quelconque efficacité (à l'instar de bon nombre de crèmes cosmétiques maiiiiiis c'est pas le sujet).
Il a alors été proposé des supplémentations sous forme orale -poudre ou pillule-, qui seraient plus facilement assimilées par le corps.
Vendus sous forme de peptides de collagène ou de collagène hydrolysé facilement absorbables, ces suppléments -dont certains contiennent des nutriments supplémentaires comme la vitamine C, la biotine ou le zinc-connaissent une explosion de popularité auprès des consommateurs.
Mais qu'en dit la recherche ?
Naturellement, la plupart des recherches sont liées à la santé des articulations et à la peau.
Bien que les études sur des modèles humains font défaut, certains essais contrôlés randomisés ont montré que la supplémentation en collagène améliore l'élasticité de la peau.
D'autres essais ont montré que ces suppléments peuvent contribuer à l'amélioration de la mobilité articulaire et diminuer les douleurs comme l'arthrose ou chez les athlètes.
Comprenant environ 60% du cartilage, un tissus très ferme qui entoure les os et amorti le choc des mouvements à fort impact, une dégradation en collagène est susceptible d'entraîner une perte de cartilage et des problèmes articulaires.
Bon bah, on attend quoi pour se supplémenter ?
Des problèmes subsistent quant à toutes ces affirmations, à commencer par les potentiels conflits d'intérêts puisque la majorité des études sont financées, totalement ou en partie, par des industries connexes qui pourraient bénéficier d'un résultat positif de l'étude. Ajoutez à cela les biais de publications, qui est la tendance à publier principalement les études obtenant des résultats favorables, et vous comprendrez qu'il est difficile de déterminer l'efficacité réelle des suppléments de collagène et de soutenir leur prix souvent élevé. À l'inverse, il est tout aussi difficile d'affirmer que le collagène aurait une efficacité nulle.
Récemment, une étude constituée de 3 groupes d'athlètes chargés de consommer 30g de whey, 30g de collagène ou un placebo après avoir effectué un entraînement de résistance ont été contrôlés.
Bien qu'un effet ait été observé dans l'absolu chez les deux groupes tests, seul le groupe ayant consommé de la protéine whey a eu un effet notable sur la synthèse protéique myofibrillaire, et la supplémentation en collagène n'a pas significativement augmenté la synthèse protéique myofibrillaire ni celle des tissus conjonctifs.
Pour ce qui est de l'effet sur les tissus conjonctifs, ni la whey ni le collagène n'ont eu d'efficacité supérieure au placebo au demeurant.
La supplémentation en collagène de type II ne semble pas non plus bénéfique chez les personnes souffrant d'ostéoporose.
Un autre inconvénient : les inconnus quant à la composition exacte de ces compléments alimentaires. Il existe en effet des préoccupations concernent l'usage de suppléments pouvant contenir des métaux lourds.
Pour rappel, la FDA (Food and Drug Administration) aux États-Unis n'examine pas la sécurité ou l'efficacité des compléments alimentaires avant qu'ils soient commercialisés.
Un dernier point potentiellement néfaste est que la prise de suppléments peut servir d'excuse -consciente ou non- pour se substituer à des comportements et des habitudes de vie saine comme évoqué plus haut, et dont on sait avec certitude qu'elles aident à lutter contre le déclin progressif du collagène.
Ceci étant dit, les recherches disponibles n'ont pas montré d'effets secondaires négatifs chez les personnes recevant des suppléments de collagène à doses modérées (<30 grammes par jour). La DL50 des suppléments oraux de collagène chez les rongeurs est d'environ 5 grammes par kg, ce qui équivaudrait à environ 350 grammes par jour pour un être humain de 70 kg.
Il existe deux formes principales de suppléments de collagène disponibles dans le commerce : le collagène bovin, issu principalement de la peau et du tissu conjonctif des vaches, et le collagène marin provenant de la peau, des os et des écailles de poisson.
Les deux suppléments de collagène fournissent des quantités et des types de collagène similaires avec des différences mineures ; le collagène marin fournit du collagène de type I et de type II tandis que le collagène bovin fournit plus de collagène de type I et de type III.
Bien que des études indiquent que le collagène marin soit mieux absorbé du fait d'une meilleure biodisponibilité, il n'existe cependant pas de données à ma connaissance pouvant laisser penser que l'un produise de meilleurs résultats que l'autre en terme d'effet.
Peut-on manger du collagène ?
Il existe beaucoup d'aliments contenant du collagène ou pouvant aider à sa synthèse tel que le poisson, les crustacés, la viande, les oranges, les kiwis, les poivrons, les œufs ou les grains entiers.
Le collagène se trouve également dans les os et la peau des poissons d'eau douce et salée. Le bouillon d'os, un aliment tendance qui figure en bonne place dans les allées de soupe, est présenté comme un aliment santé riche en collagène.
Le processus est simple : faire mijoter des os d'animaux dans de l'eau et une petite quantité de vinaigre (pour aider à dissoudre l'os et à libérer du collagène et des minéraux) pendant 4 à 24 heures. Cependant, la quantité d'acides aminés variera d'un lot à l'autre en fonction des types d'os utilisés, de la durée de cuisson et de la quantité de traitement qu'à subi la viande (par exemple, s'il s'agit d'une version emballée/en conserve).
Au cours des dernières années, le bouillon, et notamment les bouillons de poulet a été promu pour soulager les symptômes des troubles psychiatriques et neurodéveloppementaux, comme l'autisme et l'hyperactivité avec déficit de l'attention.
On a même vu surgir des affirmations selon lesquelles il détoxifie le foie, améliorent la digestion, inverse les rides, renforce les os et soulage les douleurs articulaires.
En réalité, le bouillon d'os ne contient que de petites quantités de minéraux naturellement présents dans les os, notamment le calcium, le magnésium, le potassium, le fer, le phosphore, le sodium et le cuivre, et ne possède pas les vertus que certains lui prête.
On craint même que le bouillon d'os ne contienne des métaux toxiques comme le plomb.
En effet, une petite étude a révélé que le bouillon d'os à base d'os de poulet contenait trois fois plus de plomb que le bouillon de poulet à base de viande uniquement. Cependant, cette quantité par portion était encore inférieure à la moitié de la quantité autorisée par l'Environmental Protection Agency dans l'eau potable.
Une autre étude a révélé que le bouillon d'os, à la fois fait maison et produit commercialement, contenait de faibles niveaux (<5% RDA) de calcium et de magnésium ainsi que des métaux lourds comme le plomb et le cadmium. [9] L'étude a noté que divers facteurs peuvent affecter la quantité de protéines et de minéraux extraits dans le bouillon d'os : la quantité d'acidité, le temps de cuisson, la température de cuisson et le type d'os animal utilisé. Par conséquent, il est probable que la valeur nutritionnelle des bouillons d'os varie considérablement.
La gélatine est également une forme de collagène fabriquée en faisant bouillir des os, du cartilage et de la peau d'animaux pendant plusieurs heures, puis en laissant le liquide refroidir et durcir. Le collagène et son dérivé, la gélatine, sont promus sur certains régimes alimentaires comme le régime paléo (dont on a déjà parlé ailleurs et que je déconseille). La quantité de protéines, obtenue à partir de la gélatine, varie de 5 à 10 grammes par tasse.
Le plus intéressant reste très certainement les aliments stimulant la synthèse de collagène, c'est à dire les aliments riches en acides aminés qui le constitue : la glycine, la proline et l'hydroxyproline. Ces acides aminés sont trouvables dans le poisson, la volaille, la viande, les œufs, les produits laitiers, les légumineuses et le soja ou directement sous forme de poudre dans les compléments alimentaires.
En outre, la production de collagène nécessite également des micronutriments comme le zinc (impliqué dans la régulation de l'activité enzymatique nécessaire à la synthèse du collagène) et de la vitamine C (cofacteur à la conversion de la proline en hydroxyproline).
En conclusion
Bien que plusieurs études semblent indiquer des résultats positifs quand d'autres ne démontrent que peu voir pas d'effet, il est important de considérer qu'il n'existe pas encore de consensus établi quant à l'efficacité de la supplémentation en collagène à l'heure actuelle, et que d'autres recherches indépendantes doivent être menées.
La production naturelle de collagène étant soutenue par une alimentation équilibrée et des habitudes de vie saine, voici quelques conseils à appliquer avant -ou pendant- d'envisager une supplémentation :
Concentrez vous sur votre alimentation : consommez suffisamment de protéines et d'aliments contenant des précurseurs du collagène et ayez une hydratation optimale.
Dormez suffisamment : le manque de sommeil impact le processus de régénération du collagène.
Limitez les temps d'exposition au soleil ou/et portez un écran solaire : 20mn d'exposition quotidienne sont suffisante pour stimuler la production de vitamine D, mais les rayonsu UV peuvent causer un stress oxydatif entraînant la formation de radicaux libres qui endommagent les fibres de collagène et leur dégradation de façon accélérée.
Limitez les comportements à risque comme l'alcool et la cigarette
Faites de l'exercice : la pratique régulière d'exercice ralentit l'activité cellulaire impliquée dans le vieillissement cutané.
Et si vous décidez d'expérimenter un complément de collagène, optez pour une marque qui se distingue par sa transparence, son respect des normes de qualité et ayant une traçabilité exemplaire !
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