La vitamine B12, aussi appelée cobalamine, est une vitamine indispensable au bon fonctionnement de l’organisme. Pourtant, une part importante de la population, notamment les végétariens, les personnes âgées ou celles atteintes de troubles digestifs, en manquent sans le savoir.
Une carence peut passer inaperçue pendant des mois, voire des années, avant d’entraîner des troubles neurologiques, une fatigue persistante ou une anémie. Comprendre son rôle, ses sources et les signaux d’alerte est essentiel pour agir avant qu’il ne soit trop tard.
- Qu’est-ce que la vitamine B12 ?
- Origine de la vitamine B12
- Carence en vitamine B12 : symptômes et conséquences
- Prise en charge de la carence en vitamine B12
Qu’est-ce que la vitamine B12 ?
La vitamine B12 est une vitamine hydrosoluble : c’est-à-dire qu’elle se dissout dans l’eau, et fait partie du complexe des vitamines B. Sa structure est fascinante : un atome de cobalt trône au centre d’un vaste anneau moléculaire, le noyau corrine. C’est de là que vient son autre nom, cobalamine.
Elle existe sous plusieurs formes naturelles : la méthylcobalamine, l’adénosylcobalamine et l’hydroxocobalamine (formes actives présentes dans les aliments d’origine animale). En revanche, la cyanocobalamine, très répandue dans les compléments alimentaires, est une forme synthétique qui doit être transformée dans le foie avant d’être utilisable.
Ce détail chimique change tout : selon la forme consommée, la biodisponibilité et l’assimilation peuvent varier. C’est pourquoi certaines formules, comme celles à base de méthylcobalamine, sont souvent privilégiées pour leur forme naturellement active.
Rôle dans l’organisme
Si la vitamine B12 a autant d’importance, c’est qu’elle agit au cœur du métabolisme cellulaire. Elle intervient comme cofacteur enzymatique pour deux enzymes :
- la méthionine synthase, qui participe à la transformation de l’homocystéine en méthionine : une réaction essentielle à la synthèse de l’ADN et à la régénération cellulaire ;
- la méthylmalonyl-CoA mutase, impliquée dans le métabolisme énergétique des acides gras et des acides aminés.
Autrement dit, la vitamine B12 aide les cellules à produire de l’énergie, à réparer l’ADN et à maintenir l’intégrité du système nerveux.
Sans elle, le corps accumule des métabolites toxiques comme l’acide méthylmalonique et l’homocystéine, qui peuvent perturber le fonctionnement des neurones et ralentir la production d’énergie.
Importance de la vitamine pour les globules rouges
La vitamine B12 joue un rôle essentiel dans la formation normale des globules rouges.
Ces cellules, produites dans la moelle osseuse, transportent l’oxygène vers tous les organes. Lorsqu’il manque de B12, le corps peine à synthétiser correctement l’ADN des cellules sanguines. Résultat : les globules rouges deviennent plus gros mais moins efficaces, un phénomène appelé anémie mégaloblastique.
Cette anémie provoque une pâleur inhabituelle, un essoufflement rapide à l’effort, des vertiges ou une fatigue inexpliquée. Contrairement à ce qu’on pense souvent, elle ne touche pas que les personnes âgées : les jeunes adultes végétaliens ou souffrant de troubles digestifs peuvent également en être victimes.
Les globules rouges, les cellules nerveuses et le métabolisme énergétique dépendent tous, d’une manière ou d’une autre, de cette molécule invisible qu’est la vitamine B12. Sans apport suffisant, c’est toute la mécanique du corps qui se dérègle, lentement, mais sûrement.
Origine de la vitamine B12
Sources alimentaires d’origine animale
La vitamine B12 n’est produite ni par les plantes ni par les animaux, mais par des micro-organismes : principalement des bactéries, présents dans le sol ou dans le tube digestif des ruminants. Les animaux, en consommant ces bactéries ou les aliments qui en contiennent, accumulent ensuite la vitamine dans leurs tissus.
C’est pourquoi on ne trouve de vitamine B12 naturelle qu’au sein des produits d’origine animale.
Les meilleures sources restent la viande rouge (notamment le bœuf et le foie), les poissons et fruits de mer, ainsi que les œufs et les produits laitiers. Le foie concentre particulièrement cette vitamine, à des niveaux bien supérieurs à ceux d’autres aliments.
Le poisson gras, comme le saumon, le maquereau ou les sardines, en fournit également d’excellentes quantités, tout comme certaines coquillages comme les moules ou les huîtres.
Ces apports sont généralement suffisants chez les personnes qui consomment régulièrement des produits animaux. En revanche, les régimes végétariens et végétaliens en sont naturellement dépourvus, exposant à une carence progressive, parfois silencieuse pendant plusieurs années.
Dans la pratique, un adulte omnivore atteint facilement les apports recommandés grâce à une alimentation équilibrée. Mais les besoins augmentent avec l’âge, et la capacité d’absorption diminue, ce qui explique la fréquence des déficits chez les seniors, même non végétariens.
Notre vitamine B12 est formulée à partir de méthylcobalamine ultra-assimilable, une forme naturellement active de la vitamine B12 qui contribue à réduire la fatigue et à soutenir le fonctionnement normal du système nerveux.
Aliments enrichis et produits à base de plantes
Pour pallier cette absence dans les végétaux, certains aliments d’origine végétale sont aujourd’hui enrichis artificiellement en vitamine B12. C’est le cas de certaines boissons végétales, céréales petit-déjeuner ou levures nutritionnelles.
La vitamine ajoutée y est généralement sous forme de cyanocobalamine, une version synthétique stable et bon marché, mais qui doit être convertie dans le foie en formes actives avant d’être utilisée par l’organisme.
Cependant, ces produits ne se valent pas tous. Les taux d’enrichissement varient beaucoup selon les marques, et certaines levures ou algues vendues comme « riches en B12 » ne contiennent en réalité que des analogues inactifs, incapables d’être utilisés par le corps humain.
Ainsi, même dans le cadre d’un régime végétarien ou végan bien construit, une supplémentation reste souvent nécessaire pour couvrir les besoins quotidiens. La simple consommation d’aliments enrichis, seule, ne suffit pas toujours à prévenir une carence.
Absorption et métabolisme de la vitamine B12
L’absorption de la vitamine B12 est un mécanisme d’une précision remarquable, mais aussi d’une grande fragilité.
Une fois ingérée, la vitamine B12 est libérée des protéines alimentaires dans l’estomac grâce à l’acide gastrique. Elle se lie d’abord à une protéine transitoire, l’haptocorrine, avant d’être transférée, plus bas dans le tube digestif, au facteur intrinsèque, une glycoprotéine sécrétée par les cellules pariétales de l’estomac.
Ce duo, vitamine B12 et facteur intrinsèque, forme un complexe qui voyage jusqu’à l’iléon, la dernière portion de l’intestin grêle, où il est reconnu et absorbé via un récepteur spécifique appelé CUBAM.
Une fois passée dans le sang, la vitamine B12 circule principalement liée à une protéine de transport, la transcobalamine II, qui l’achemine vers le foie, le cerveau et la moelle osseuse. Le foie en stocke d’importantes quantités, suffisantes pour plusieurs années, ce qui explique pourquoi une carence peut mettre longtemps à apparaître.
Mais cette chaîne d’absorption complexe rend la vitamine B12 vulnérable à de nombreux obstacles :
- une acidité gastrique insuffisante (fréquente chez les personnes âgées ou sous inhibiteurs de la pompe à protons) empêche sa libération des aliments ;
- une atteinte du facteur intrinsèque, comme dans la maladie de Biermer, qui bloque l’absorption intestinale ;
- certaines maladies digestives (Crohn, cœliaque, résection de l’iléon) réduisent la surface d’absorption ;
- et certains médicaments, notamment la metformine, peuvent interférer avec le transport intestinal.
Ces multiples maillons fragiles expliquent pourquoi des personnes qui mangent « correctement » peuvent, malgré tout, présenter une carence en vitamine B12.
Chez ceux en bonne santé, le corps conserve des réserves suffisantes pour trois à cinq ans ; mais dès qu’un maillon se brise, les symptômes s’installent lentement.
Recommandations sur le dosage de la vitamine B12
Apports nutritionnels recommandés
Les apports nutritionnels de référence en vitamine B12 sont étonnamment faibles comparés à d’autres micronutriments : il suffit de 2,4 microgrammes par jour pour un adulte en bonne santé. Ce chiffre, établi par les autorités sanitaires européennes, correspond à la quantité minimale permettant de maintenir un métabolisme énergétique normal, le fonctionnement normal du système nerveux et la formation normale des globules rouges.
Les besoins spécifiques augmentent également chez la femme enceinte (2,6 µg/j) et la femme allaitante (2,8 µg/j), car la vitamine B12 est essentielle au développement du système nerveux du fœtus et du nourrisson.
Sécurité et risques de surdosage
Contrairement aux vitamines liposolubles (A, D, E, K) qui s’accumulent dans le corps, la vitamine B12 est hydrosoluble : l’excédent est naturellement éliminé par les urines. À ce jour, aucun effet indésirable grave n’a été observé même à des doses très supérieures aux apports recommandés.
Les compléments les plus dosés peuvent contenir 1000 µg ou plus par gélule, soit plus de 40000 % des apports de référence, sans présenter de danger documenté. Ces dosages élevés sont souvent justifiés chez les personnes souffrant de malabsorption ou suivant un régime végétalien, car seule une fraction de la dose est réellement assimilée.
Certaines études cliniques, notamment sur la méthylcobalamine (forme active naturelle), ont montré qu’une supplémentation quotidienne élevée était bien tolérée même sur le long terme. Cependant, une trop forte concentration sanguine de B12 sans supplémentation peut signaler une autre cause (atteinte hépatique ou désordre métabolique) et justifie une évaluation médicale.
Carence en vitamine B12 : symptômes et conséquences
Symptômes d’une carence en vitamine B12
Signes physiques de la carence
Une carence en vitamine B12 ne se déclare pas du jour au lendemain. Elle s’installe progressivement, souvent sans bruit, jusqu’à ce que les premiers signes deviennent trop visibles pour être ignorés.
Le symptôme le plus fréquent reste une fatigue persistante, celle qui ne passe ni avec le sommeil ni avec le repos. Elle s’accompagne souvent d’une pâleur inhabituelle, d’un essoufflement rapide à l’effort, voire de vertiges. Ces manifestations découlent directement de la production altérée des globules rouges : faute de B12, leur formation devient inefficace, et l’oxygène circule moins bien dans le corps.
Les personnes carencées peuvent aussi ressentir une faiblesse musculaire diffuse, des engourdissements ou une sensation de picotements dans les mains ou les pieds. Ces troubles dits neuropathiques apparaissent lorsque les nerfs sont mal nourris, car la vitamine B12 joue un rôle essentiel dans la synthèse de la myéline, cette gaine protectrice qui entoure les fibres nerveuses.
Des troubles digestifs (perte d’appétit, nausées, langue douloureuse ou lisse appelée « glossite ») peuvent également se manifester, parfois avant même que le déficit sanguin ne soit détecté.
Autrement dit, derrière un simple coup de fatigue, il peut se cacher un véritable déséquilibre métabolique. Et plus la carence dure, plus les effets deviennent profonds et durables.
Troubles cognitifs et neurologiques
Lorsque le manque de vitamine B12 s’installe, il ne touche pas seulement le corps : il atteint aussi le cerveau.
Des études observationnelles ont montré qu’un déficit prolongé en B12 était associé à des troubles de la mémoire, des difficultés de concentration et, chez certaines personnes âgées, à une accélération du déclin cognitif. Les chercheurs évoquent un lien possible entre le taux élevé d’homocystéine, un acide aminé qui s’accumule lorsque la B12 manque, et la détérioration neuronale.
Sur le plan clinique, cela peut se traduire par des troubles de l’humeur (irritabilité, anxiété, épisodes dépressifs), voire, dans les cas sévères, par des atteintes neurologiques irréversibles : perte de sensibilité, troubles de la marche ou désorientation.
Les symptômes neurologiques peuvent apparaître même sans anémie associée, ce qui rend la détection parfois difficile. C’est pourquoi un dosage sanguin précoce reste la seule façon fiable de confirmer une suspicion de carence.
Impact sur le système immunitaire
La vitamine B12 contribue au fonctionnement normal du système immunitaire. En cas de carence, cette fonction se trouve compromise : le corps réagit plus lentement face aux infections, et la régénération cellulaire est perturbée.
Certaines personnes constatent une plus grande sensibilité aux virus saisonniers, des petites infections à répétition ou une cicatrisation ralentie. Ces signes, souvent banalisés, traduisent pourtant une altération du renouvellement cellulaire et une diminution de la production des globules blancs.
Chez les individus déjà fragiles (personnes âgées, malades chroniques), un déficit prolongé peut affaiblir encore davantage les défenses naturelles, rendant la récupération plus lente après une infection.
Conséquences à long terme de la carence
Risques de maladies liées à un déficit
Une carence non traitée en vitamine B12 peut entraîner une série de complications dont certaines sont irréversibles.
Les études cliniques montrent qu’un déficit prolongé favorise une augmentation de l’homocystéine sanguine, associée à un risque cardiovasculaire plus élevé (Zhou et al., 2019). Bien que le lien de causalité directe reste discuté, l’hypothèse d’un rôle indirect de la B12 dans la protection vasculaire est aujourd’hui largement étudiée.
Sur le plan neurologique, un manque prolongé peut provoquer une dégénérescence de la moelle épinière (atteinte combinée subaiguë), entraînant une perte de coordination et des troubles moteurs parfois irréversibles. Ces manifestations graves restent rares, mais soulignent l’importance d’un diagnostic précoce.
Prise en charge de la carence en vitamine B12
Diagnostic et dépistage de la carence
Tests sanguins et analyse des symptômes
Devant une fatigue persistante, des fourmillements ou une pâleur anormale, le premier réflexe doit être un bilan sanguin. Le dosage de la vitamine B12 sérique reste l’examen de base : une valeur inférieure à 180 ng/mL (133 pmol/L) confirme la carence, tandis qu’un taux supérieur à 350 ng/mL (258 pmol/L) la rend peu probable.
Entre ces deux seuils, l’analyse doit être complétée par la dosage de l’homocystéine et de l’acide méthylmalonique, deux marqueurs biochimiques qui s’accumulent en cas de déficit cellulaire.
Mais le diagnostic ne repose pas uniquement sur les chiffres. Il faut toujours interpréter le résultat à la lumière des symptômes : une personne peut présenter des signes neurologiques typiques malgré un taux « normal » si la B12 n’est pas correctement utilisée dans les tissus.
Importance de la consultation médicale
Face à un résultat suspect, la consultation médicale est incontournable. Seul un professionnel peut distinguer une carence d’apports d’un trouble d’absorption.
Le médecin évalue les antécédents, les traitements en cours et, si nécessaire, prescrit des examens complémentaires : endoscopie, dosage des anticorps anti-facteur intrinsèque ou anticellules pariétales.
Une autoprescription de compléments sans évaluation médicale risque de masquer un déficit plus profond ou une maladie digestive. Dans les cas d’atteinte de l’estomac ou de l’iléon, la supplémentation orale seule ne suffit pas : l’injection intramusculaire devient alors le traitement de référence.
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