Présents dans des yaourts, des compléments ou des aliments fermentés, les probiotiques sont aujourd’hui étudiés pour leur possible influence sur l’équilibre du microbiote intestinal et sur la réponse inflammatoire. Plus récemment, certaines levures alimentaires, longtemps restées dans l’ombre des lactobacilles, ont elles aussi révélé un potentiel anti-inflammatoire selon des travaux expérimentaux.
Alors, comment agissent ces micro-organismes vivants ? Quelles sont les souches les plus prometteuses ? Et dans quel cadre leur consommation pourrait-elle être pertinente ?
- Définition des probiotiques et levures alimentaires
- Propriétés anti-inflammatoires des probiotiques
- Le microbiote intestinal et l’inflammation
- Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI)
- Équilibre de la flore intestinale
- Recommandations pour intégrer les probiotiques
Définition des probiotiques et levures alimentaires
Qu’est-ce qu’un probiotique ?
Un probiotique, selon la définition admise par l’OMS et la FAO, est un micro-organisme vivant qui, administré en quantité adéquate, confère un bénéfice à la santé de l’hôte. Il ne s’agit donc ni de vitamines, ni de fibres, ni d’antibiotiques naturels : ce sont des bactéries ou des levures non pathogènes qui passent la barrière digestive et interagissent avec notre microbiote, de manière transitoire ou plus durable.
Parmi les genres les plus couramment documentés, on retrouve Lactobacillus, Bifidobacterium, Streptococcus, mais aussi certaines espèces de Saccharomyces, comme Saccharomyces boulardii, seule levure reconnue comme probiotique dans les pharmacopées européennes.
Pour qu’un probiotique soit validé, il doit faire l’objet d’une caractérisation précise par souche, démontrer une résistance aux sucs gastriques, une capacité d’adhésion à l’intestin, et surtout, disposer de résultats cliniques documentés (FAO/WHO, 2006).
Rôle des levures alimentaires
Longtemps considérées uniquement comme des outils, pour faire lever le pain ou affiner les fromages, certaines levures alimentaires commencent à être étudiées pour leur potentiel effet sur l’inflammation intestinale.
Une équipe de l’INRAE a montré que Cyberlindnera jadinii et Kluyveromyces lactis, deux levures courantes dans des fromages comme le brie ou le munster, pourraient réduire la sensibilité à l’inflammation intestinale chez la souris (Hugot et al., 2023). Les mécanismes précis restent à explorer, mais cette observation ouvre la voie à une revalorisation nutritionnelle de certaines souches alimentaires, y compris dans des aliments du quotidien.
De manière plus établie, Saccharomyces boulardii a été étudiée pour sa résistance naturelle à l’acidité gastrique, sa capacité à produire de l’acétate et ses interactions avec l’immunité innée, en modulant notamment les cytokines pro- et anti-inflammatoires (Kelesidis et al., 2020). Les β-glucanes présents dans sa paroi cellulaire agiraient comme des signaux capables de stimuler certaines réponses immunitaires, notamment via l’interleukine-10 (IL-10), un médiateur impliqué dans la tolérance intestinale.
Importance dans l’alimentation
Les aliments fermentés traditionnels (kéfir, choucroute, pain au levain, kombucha…) apportent naturellement certains micro-organismes vivants, même si leurs effets sont souvent moins ciblés que ceux des compléments standardisés.
L’avantage des formulations probiotiques brevetées tient justement à la maîtrise des doses, de la souche, et de la viabilité jusqu’au site d’action. On estime qu’un apport quotidien ≥ 10⁹ UFC (unités formant colonie) est nécessaire pour espérer un effet (Wilkins, 2017).
À noter que l’ajout de prébiotiques (fibres fermentescibles comme l’inuline) peut également favoriser l’implantation et l’activité des souches administrées.
Propriétés anti-inflammatoires des probiotiques
Mécanismes d’action des probiotiques
Les effets anti-inflammatoires potentiels des probiotiques ne reposeraient pas sur un seul mécanisme, mais sur une cascade de potentielles actions synergiques, incluant :
- La production d’acides gras à chaîne courte (AGCC), comme le butyrate, reconnu pour favoriser l’activation des lymphocytes T régulateurs (Treg) via les récepteurs GPR43 et GPR109a (Tan et al., 2014).
- La modulation des voies de signalisation immunitaire : inhibition de NF-κB, activation de JAK/STAT, réduction des cytokines pro-inflammatoires comme IL-6, TNF-α, IL-1β, et augmentation des cytokines anti-inflammatoires (IL-10) (Plaza-Díaz et al., 2017).
- Le renforcement de la barrière intestinale, en stimulant la production de protéines comme l’occludine ou la ZO-1, impliquées dans les jonctions serrées entre les cellules épithéliales.
- L’inhibition des bactéries pathogènes adhérentes-invasives, notamment E. coli AIEC, via une compétition pour les sites d’adhésion.
- La séquestration de lipopolysaccharides (LPS) et la réduction de la translocation bactérienne, qui contribuent à l’inflammation systémique (Lee et al., 2016).
Ces mécanismes ont été majoritairement mis en évidence dans des modèles animaux ou in vitro. Leur traduction clinique chez l’humain reste soumise à variabilité, selon les souches, les doses, et les profils individuels.
Études sur l’effet anti-inflammatoire
Une méta-analyse portant sur 24 études animales a montré que les probiotiques issus de Lactobacillus ou Bifidobacterium réduiraient significativement l’inflammation colique dans des modèles de colite induite (Wang et al., 2022). Chez l’humain, les données sont plus hétérogènes. Certaines études sur la colite ulcéreuse ont observé une augmentation des taux de rémission clinique avec des cocktails multi-souches, comme VSL#3 (Sood et al., 2009).
D’autres travaux ont étudié des associations plus ciblées, par exemple un mélange de Saccharomyces boulardii, Lactobacillus rhamnosus et Bifidobacterium breve, qui aurait permis d’augmenter la production d’AGCC et de réduire les marqueurs inflammatoires dans un modèle d’iléite murin (Miyauchi et al., 2021).
Ces effets sont prometteurs, mais doivent être interprétés avec prudence, en tenant compte de la souche précise, de la population étudiée et du cadre expérimental.
Souches potentiellement efficaces contre l’inflammation
Certaines souches spécifiques ont été documentées pour leurs effets potentiels dans le cadre de l’inflammation intestinale :
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Lactobacillus plantarum NK151 : aurait permis de réduire IL-6 et IL-1β dans un modèle de colite murine (Wang et al., 2022).
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Bifidobacterium longum NK173 : suggéré pour atténuer l’activation de NF-κB et améliorer la réponse au stress (Lee et al., 2016).
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Lactobacillus rhamnosus GG : testé chez des enfants atteints de maladie de Crohn, avec une diminution du CDAI (Crohn’s Disease Activity Index) de 73 % dans une étude pilote (Bousvaros et al., 2005).
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Saccharomyces boulardii : utilisé dans divers contextes d’inflammation intestinale, avec une tolérance documentée et des effets anti-inflammatoires suggérés, notamment via la production d’acétate.
Ces souches ne sont pas interchangeables. Leur effet dépend de leur souche exacte, du dosage, du contexte clinique, et de leur mode d’administration. Il est donc déconseillé de généraliser leurs bienfaits sans cadre précis.

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Le microbiote intestinal et l’inflammation
Rôle du microbiote dans la santé intestinale
Le microbiote adulte représente jusqu’à 100 000 milliards de micro-organismes, formant un écosystème en interaction constante avec l’hôte. Il participe à la digestion des fibres, à la synthèse de vitamines (K, B12…), à la formation des AGCC et à la maturation du système immunitaire intestinal. On estime que près de 70 % des cellules immunitaires résident dans l’intestin, ce qui en fait un organe clé dans la régulation de l’inflammation (Cani, 2014).
Dysbiose et maladies inflammatoires
Lorsqu’un déséquilibre s’installe, baisse de diversité microbienne, domination de souches opportunistes, on parle de dysbiose.
Elle est associée à des troubles digestifs chroniques, mais aussi à des manifestations plus systémiques (peau, humeur, immunité). Dans le cas des MICI, on observe fréquemment une perte des espèces protectrices comme Faecalibacterium prausnitzii, couplée à une surreprésentation de bactéries pro-inflammatoires, comme E. coli AIEC ou des Enterobacteriaceae (Miquel et al., 2013).
Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI)
Comprendre les MICI
Les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) regroupent deux entités : la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique, aussi appelée colite ulcéreuse. Ces affections se caractérisent par une inflammation persistante du tube digestif, avec des poussées évolutives entrecoupées de phases de rémission. Leur origine est multifactorielle : facteurs génétiques, immunitaires, environnementaux et microbiens s'entremêlent dans un déséquilibre complexe encore imparfaitement élucidé.
Définition et symptômes
La maladie de Crohn peut toucher l’ensemble du tube digestif, de la bouche à l’anus, avec une atteinte transmurale, c’est‑à‑dire une inflammation qui traverse toute l’épaisseur de la paroi intestinale. Elle s’exprime souvent par des douleurs abdominales, une diarrhée chronique, une perte de poids et parfois des lésions anales.
La colite ulcéreuse, quant à elle, reste limitée au côlon et au rectum, avec une inflammation de la seule muqueuse. Elle se manifeste le plus souvent par des rectorragies (sang dans les selles), des envies pressantes et une fatigue significative. Dans les deux cas, on parle de pathologies inflammatoires de fond, sans cause infectieuse ou médicamenteuse identifiée.
Relation avec le microbiote
Depuis une dizaine d’années, les recherches sur le microbiote ont profondément renouvelé la compréhension des MICI. Il a été observé que les patients atteints présentent fréquemment une diminution de la diversité bactérienne (diversité alpha), une augmentation de certaines espèces pro-inflammatoires et une déplétion de souches bénéfiques comme Faecalibacterium prausnitzii, souvent associée à une fonction potentiellement anti-inflammatoire dans l’intestin sain (Lopez-Siles et al., 2017).
Dans des modèles expérimentaux, le transfert du microbiote d’un patient atteint de MICI à une souris axénique (dépourvue de flore intestinale) peut induire une inflammation colique spontanée. À l’inverse, certaines souches bactériennes ou levuriennes testées dans ces modèles ont permis d’atténuer cette inflammation et de renforcer la barrière intestinale, suggérant une possible piste microbiotique dans la modulation des symptômes (Nagao-Kitamoto et al., 2016).
Cas des maladies de Crohn et colite collagène
Certaines études cliniques ont testé l’effet préventif ou adjuvant de souches probiotiques dans la maladie de Crohn. Par exemple, un essai randomisé a évalué la souche Lactobacillus johnsonii LA1 en prévention post-chirurgicale de récidive, sans bénéfice significatif observé (Prantera et al., 2002). Cela illustre la nécessité de sélectionner avec rigueur les souches testées, selon l’indication.
Dans le cas plus rare de la colite collagène, une étude ouverte conduite sur 21 patients a observé qu’une supplémentation avec Saccharomyces boulardii avait été associée à une réduction de l’infiltrat lymphocytaire et à une amélioration du transit (Kelesidis et al., 2015). Ces données doivent être interprétées avec prudence en raison de la petite taille de l’échantillon et de l’absence de bras placebo.
Équilibre de la flore intestinale
Importance d’une flore équilibrée
Un microbiote diversifié, riche en bactéries productrices d’AGCC (acides gras à chaîne courte), est aujourd’hui considéré comme un facteur de résilience de l’immunité intestinale. Ces composés,notamment le butyrate, participent à la tolérance immunitaire, à la réparation des tissus épithéliaux et à la régulation des voies inflammatoires via des récepteurs spécifiques (GPR109a, GPR43) (Tan et al., 2014).
Lorsque cet équilibre est rompu, les mécanismes de défense intestinaux peuvent se dérégler, ouvrant la porte à des réponses inflammatoires excessives ou chroniques.
Stratégies pour "restaurer" l’équilibre
Dans un contexte de déséquilibre du microbiote, certaines stratégies alimentaires peuvent soutenir une recolonisation microbienne bénéfique :
- Une alimentation riche en fibres solubles, inspirée du régime méditerranéen, a été associée à une plus grande richesse microbienne, notamment en bifidobactéries et lactobacilles (Cani, 2014).
- Les prébiotiques, comme l’inuline de topinambour, peuvent favoriser la croissance de bactéries bénéfiques, mais leur tolérance varie selon les individus.
- Les synbiotiques, qui associent probiotiques et fibres fermentescibles, sont étudiés pour leur effet synergique sur l’implantation bactérienne.
- Enfin, dans les formes sévères ou réfractaires, la transplantation de microbiote fécal (FMT) est parfois envisagée, avec un taux de rémission clinique d’environ 25 % dans certaines colites ulcéreuses réfractaires (Paramsothy et al., 2017). Cette approche reste encadrée strictement sur le plan médical.
Recommandations pour intégrer les probiotiques
Types de probiotiques à privilégier
Tous les produits étiquetés « probiotiques » ne se valent pas. Pour garantir un usage pertinent, plusieurs critères doivent être vérifiés :
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La souche exacte doit être mentionnée (ex. Lactobacillus plantarum UALp‑05), avec un dépôt dans une collection reconnue.
- La dose par portion doit atteindre un minimum de 10⁹ UFC, avec une forme galénique adaptée (gélules gastro-résistantes, lyophilisation stable…).
- Les souches ayant fait l’objet d’études documentées, comme L. rhamnosus GG, B. longum NCC3001 ou S. boulardii CNCM I-745, sont à privilégier, dans le respect du cadre de chaque indication (Plaza-Díaz et al., 2017).
Certaines formulations associent plusieurs souches complémentaires ainsi que des prébiotiques (inuline, fibres d’acacia), dans une logique synergique visant à soutenir l’implantation des bactéries et leur activité dans le côlon.
Conseils pratiques pour l’alimentation
Il est recommandé de consommer les probiotiques de préférence pendant les repas, et à distance des prises d’antibiotiques (au moins deux heures d’écart) afin d’éviter leur inactivation.
En complément, une alimentation variée et végétale, incluant des fruits, légumes, céréales complètes et légumineuses, est susceptible d’entretenir un environnement propice à la colonisation.
Certains aliments fermentés comme le kéfir, la choucroute crue, ou le miso non pasteurisé peuvent apporter un soutien naturel, mais leur concentration en souches spécifiques n’est ni stable ni documentée.
Compléments alimentaires et précautions
Les compléments probiotiques doivent être utilisés avec discernement. Leur usage n’est pas recommandé sans avis médical chez les personnes immunodéprimées, en raison d’un risque rare mais documenté de fongémie pour les produits à base de levures (S. boulardii) (Kelesidis et al., 2015).
De plus, il convient de vérifier les allergènes potentiellement présents dans la formulation (lait, soja), et d’éviter les produits contenant des additifs inutiles. Enfin, leur usage ne dispense jamais d’un suivi médical adapté, en particulier dans le cadre de pathologies chroniques comme les MICI.
FAQ
Quels types de probiotiques sont efficaces contre l'inflammation ?
Comment savoir si l'on souffre de dysbiose ?
Quelles recommandations pour intégrer les probiotiques dans son alimentation ?
- Miyauchi, E. et al. — A Novel Probiotic Combination Ameliorates Crohn’s Disease-Like Ileitis in SAMP1/YitFc Mice.
- Wilkins, T.; Sequoia, J. — Probiotics for Gastrointestinal Conditions: A Summary of the Evidence.
- Prantera, C. et al. — Lactobacillus johnsonii LA1 in the prevention of postoperative recurrence of Crohn’s disease (essai randomisé).
- Nagao-Kitamoto, H. et al. — (étude expérimentale) Transfert de microbiote de patients MICI induisant une colite chez la souris (titre exact selon journal).
- Lopez-Siles, M. et al. — Faecalibacterium prausnitzii: from microbiology to diagnostics and prognostics.
- Miquel, S. et al. — Faecalibacterium prausnitzii and human health (revue).
- Hugot, C.; Poirier, M. et al. — Cyberlindnera jadinii and Kluyveromyces lactis, two fungi used in food processes, have potential probiotic effects on gut inflammation.
- Plaza-Díaz, J.; Ruiz-Ojeda, F. J.; Gil-Campos, M.; Gil, A. — Mechanisms of Action of Probiotics.
- Tan, J.; McKenzie, C.; Potamitis, M.; Thorburn, A. N.; Mackay, C. R.; Macia, L. — The role of short-chain fatty acids in health and disease.
- Cani, P. D. — The gut microbiota manages host metabolism.
- Sender, R.; Fuchs, S.; Milo, R. — Revised Estimates for the Number of Human and Bacteria Cells in the Body.
- Bousvaros, A. et al. — A Randomized, Double-blind Trial of Lactobacillus GG Versus Placebo in Addition to Standard Maintenance Therapy for Children with Crohn’s Disease.
- Paramsothy, S. et al. — Multidonor intensive faecal microbiota transplantation for active ulcerative colitis: a randomised, placebo-controlled trial.
- Sood, A. et al. — The probiotic preparation, VSL#3, induces remission in patients with mild-to-moderately active ulcerative colitis.
- FAO/WHO — Probiotics in Food: Health and Nutritional Properties and Guidelines for Evaluation.