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Margarine aux oméga-3 : Un vrai intérêt pour la santé ?

Margarine aux oméga-3 : Un vrai intérêt pour la santé ?

Inventée en 1869 sous l’impulsion de Napoléon III, la margarine naît d’un besoin stratégique : fournir aux soldats une alternative économique et durable au beurre. C’est le pharmacien Hippolyte Mège-Mouriès qui met au point la première version de ce produit, en mélangeant de la graisse de bœuf chauffée, de l’eau et du petit lait.

Au fil du temps, la recette évolue pour s’adapter aux contraintes industrielles et aux attentes des consommateurs. On passe progressivement à un mélange d’huiles végétales (de colza, tournesol, palme) stabilisé par de l’eau et des émulsifiants, substances permettant d’obtenir une texture homogène et crémeuse.

Dans les années 1960, un tournant majeur s’opère : alors que le beurre est critiqué pour sa teneur en graisses saturées, les fabricants de margarine décident de valoriser leurs produits sous l’angle de la santé. Deux innovations apparaissent :

  • L’ajout de phytostérols, reconnus pour leur effet réducteur sur le cholestérol.

  • L’incorporation d’Oméga-3, des acides gras essentiels considérés comme bénéfiques pour la santé cardiovasculaire.

Ce repositionnement transforme la margarine d’un simple substitut de beurre en un produit affichant des promesses santé.

Le Contexte Actuel des margarines enrichies en Oméga 3

Aujourd’hui, le marché des margarines « enrichies en Oméga-3 » est en pleine expansion. Les supermarchés proposent une large gamme de produits formulés à partir de différentes huiles végétales (huile de colza, huile de tournesol, huile de lin, huile d’olive et même de l’huile de palme) et affichant des taux variables d’Oméga-3. L’argument mis en avant ? Leur rôle dans le maintien d’un bon cholestérol et la prévention cardiovasculaire.

Les campagnes marketing insistent particulièrement sur :

L’Efficacité réelle contestée des margarines Oméga 3

Les margarines enrichies en Oméga-3 sont souvent mises en avant comme une alternative plus saine au beurre et aux matières grasses traditionnelles. Toutefois, plusieurs limites viennent nuancer cet argument, à commencer par leur ratio Oméga-6 / Oméga-3, souvent déséquilibré.

Dans notre alimentation, en France, l’apport en Oméga-6 (présents notamment dans les huiles de tournesol, soja, maïs) est trop élevé par rapport aux Oméga-3. Idéalement, ce ratio ne devrait pas dépasser 5:1, mais il peut atteindre 15:1 voire plus dans notre régime alimentaire. Le problème ? Certaines margarines enrichies en Oméga-3 contiennent encore une proportion importante d’Oméga-6, ce qui limite ainsi leur potentiel bénéfice.

Un autre point clé réside dans la qualité des Oméga-3 présents. La plupart des margarines végétales apportent uniquement de l’ALA (acide alpha-linolénique), une forme végétale d’Oméga-3 présente dans l’huile de colza, de lin ou de noix. Or, le corps humain convertit très peu l’ALA en EPA et DHA, les formes actives des Oméga-3 aux effets protecteurs démontrés sur le système cardiovasculaire et le cerveau. En conséquence, une consommation de margarine enrichie en Oméga-3 ne garantit pas un bénéfice équivalent à celui apporté par les poissons gras (sardine, saumon, maquereau), sources directes de DHA et EPA.

Controverses sur les bénéfices santé

Les margarines enrichies en Oméga-3 sont souvent présentées comme bénéfiques pour le cœur et le cholestérol. Toutefois, les études sur leur efficacité réelle sont partagées.

Les limites des margarines oméga-3 sur le cholestérol et la santé cardiovasculaire

Les margarines enrichies en oméga-3 sont souvent mises en avant notamment pour leur effet sur le LDL-cholestérol, souvent appelé « mauvais cholestérol ». Le LDL est impliqué dans l’athérosclérose, un phénomène de dépôt graisseux dans les artères augmentant le risque de maladies cardiovasculaires. Les graisses saturées, présentes dans le beurre, sont reconnues pour favoriser son élévation, tandis que les graisses insaturées, présentes dans les huiles végétales et les margarines, peuvent aider à le réduire. C’est sur cette base que les margarines oméga-3 sont souvent promues comme des alliées de la santé cardiaque.

Cependant, si leur consommation peut effectivement réduire légèrement le LDL-cholestérol, cela ne signifie pas automatiquement une baisse du risque d’infarctus ou d’AVC. L’Alpha-Omega trial (NEJM, 2010), qui a suivi près de 4 800 patients ayant déjà subi un infarctus, a démontré qu’une margarine enrichie en oméga-3 diminuait légèrement le LDL, mais sans impact mesurable sur la mortalité cardiovasculaire ni sur la prévention d’accidents cardiaques majeurs. 

Au-delà du cholestérol, les maladies cardiovasculaires sont multifactorielle et ne dépendent pas uniquement du taux de LDL. L’hypertension, le tabagisme, la sédentarité, l’excès de triglycérides et l’inflammation jouent aussi un rôle déterminant. L’American Heart Association (AHA) et l’ANSES insistent sur l’importance d’un régime alimentaire globalement équilibré, intégrant des poissons gras, des légumes, des fibres et des bonnes graisses plutôt que de compter uniquement sur des aliments enrichis. Une illustration claire de cette approche est donnée par l’étude Lyon Diet Heart Study, qui a montré que les bénéfices cardiovasculaires étaient significatifs lorsque les patients adoptaient un régime globalement riche en oméga-3 (ALA, EPA et DHA), et non lorsqu’ils se contentaient d’un seul aliment enrichi.

Les oméga 3 sont fragiles 

L’exposition à des températures élevées (friture, cuisson à la poêle) accélère l’oxydation des oméga-3, réduisant leur efficacité biologique. Ainsi, une margarine affichant la mention « riche en oméga-3 » peut perdre une partie de ses bénéfices si elle est chauffée trop intensément. Certains fabricants tentent d’atténuer cette dégradation en ajoutant des antioxydants naturels, comme la vitamine E, pour prolonger la stabilité des oméga-3, mais cela ne les protège pas totalement des effets d’une cuisson forte.

Pour profiter des effets des margarines enrichies en Oméga 3, il est donc conseillé de la consommer froide, sur une tartine de pain par exemple.


Sources : (Réf. : [ANSES, “Les acides gras Oméga-3”], [Simopoulos, 2016]).

(Réf. : [Shahidi & Ambigaipalan, 2018])

ANSES, “Les acides gras Oméga-3”

Lyon Diet Heart Study

 

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